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Évangile selon Saint Luc 17, 5-10


« Si vous aviez de la foi comme un grain de sénevé, vous diriez à ce mûrier : déracine-toi et va te transplanter dans la mer, et il vous obéirait. »

Que vous êtes bon, mon Dieu ! Vous nous donnez part à votre toute-puissance ! Vous mettez en nos mains votre pouvoir souverain ! Vous nous faites tellement vos enfants que vous mettez votre sceptre entre nos mains ! Nous pouvons tout par la prière, vous nous le dites formellement : tout bien, puisque vous-même ne pouvez faire que le bien… Nos prières sont toujours exaucées ; si parfois elles semblent ne pas l’être, c’est ou bien qu’elles étaient trop peu ferventes, leur peu de chaleur les a empêchées de monter jusqu’à votre trône… Ou bien sans charité pour le prochain : en vous priant nous n’exaucions pas vos enfants, nous ne pardonnions pas à vos enfants… Ou bien trop peu humbles : leur orgueil leur a donné une odeur insupportable et les a empêchées d’être admises devant vous… Ou trop peu confiantes : après vos promesses, notre manque de foi vous est une insulte… Ou trop peu répétées : vous voulez que par foi, par confiance, par certitude d’être exaucé, on vous demande, redemande, sans paix ni trêve, jusqu’à ce qu’on soit exaucé; si on se décourage, vous punissez ce manque de confiance, ce manque de foi en votre parole, véritable injure, en n’accordant pas ce que vous auriez accordé de si grand cœur à plus de foi, prouvée par plus de constance dans la prière… Parfois elles avaient un ou deux de ces défauts ou tous les trois et vous les auriez exaucées quand même, si nous avions suivi votre avis tant répété de « demander à votre Père en votre nom » ; de « vous demander en votre nom », mais faute d’avoir profité de ce moyen de rendre nos prières incomparablement plus puissantes, faute « d’avoir demandé en votre nom », vous n’exaucez pas nos prières trop défectueuses et qui avaient besoin de ce divin correctif… Parfois aussi nos prières semblent n’avoir pas été exaucées et l’ont été en réalité d’une façon beaucoup plus parfaite que nous ne le demandions ; nous vous demandions une chose médiocre, vous nous exaucez, non en nous la donnant, mais en nous en donnant une très supérieure : nous vous demandons la guérison du corps d’une personne, vous nous exaucez suréminemment en nous accordant non cette guérison, mais celle de son âme : nous vous demandons la vie temporelle pour quelqu’un, vous nous exaucez suréminemment en nous accordant pour elle, non la vie ici-bas, mais une mort sainte et la vie dans le ciel… Que vous êtes bon, mon Dieu, que vous êtes bon de nous exaucer toujours, toujours, quand nous vous demandons avec ferveur, humilité, foi, charité, constance, au nom de Jésus, de nous exaucer, ou en nous accordant ce que nous demandons, ou en nous accordant mieux que ce que nous demandions… Que vous êtes divinement bon !
Mon Seigneur Jésus, faites-moi la grâce de demander, de beaucoup demander, de demander tout ce que vous voulez que je demande; de le demander avec ferveur, charité, humilité, constance, foi, en votre nom ! Je puis, je dois demander pour tous les hommes en général, et pour chacun en particulier, d’une manière absolue, non d’une manière conditionnelle, ce que vous-même m’apprenez à demander pour tous d’une manière absolue : « Que votre nom soit sanctifié, que votre règne arrive, que votre volonté soit faite par tous les hommes sur la terre comme elle est faite par les anges au ciel »… « Donnez-nous à tous le pain de la grâce, le pain de la sainte Eucharistie, le pain qui consiste à faire sans cesse votre volonté »… « Pardonnez-nous nos offenses »… « Ne nous laissez pas succomber à la tentation »… « Délivrez-nous du péché et du démon en cette vie et en l’autre »… Toutes ces paroles reviennent à demander « le bon esprit », « la Sagesse » que Notre Seigneur nous a promis de ne jamais nous refuser… Ici il nous les fait demander formellement et absolument pour tous les hommes ; d’ailleurs nous n’aimerions pas tous les hommes « comme nous-mêmes », si nous ne tâchions d’obtenir pour eux le « bon esprit », « la sagesse », les dons du « Pater », c’est-à-dire : les seuls vrais biens… Demandons-les donc formellement, absolument, comme Jésus nous l’enseigne, pour tous les hommes, parce que nous devons aimer tous les hommes également (nous-mêmes avec eux, comme l’un d’eux, pas plus que les autres, « les autres comme nous-mêmes ») pour le motif supérieur que tous les humains sont membres de Jésus (comme matière proche ou éloignée de son corps mystique) et par conséquent portion de Jésus, c’est-à-dire dignes d’un respect et d’un amour presque infinis. Demandons-le ensuite plus particulièrement pour ceux dont nous sommes spécialement chargés (parents, amis, bienfaiteurs, voisins, etc.) ; et demandons-le plus particulièrement que pour tous les autres, pour nous-mêmes, parce que nous sommes chargés plus spécialement de nous-mêmes que de tous les autres [1].

[1]  M/390, sur Lc 17,5-6, en C. DE FOUCAULD, L’imitation du Bien-Aimé. Méditations sur les Saints Évangiles (2), Nouvelle Cité, Montrouge 1997, 88-91.